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Buffy contre le Patriarcat


par: Marie-Laurence Desrosiers 

Depuis quelques mois, il y a une résurgence des groupes rock alternatif à saveur 90s sur la scène locale. Récemment, j’ai assisté à un concert de Sweetmess, band romcom pop rock brillamment mené par leur frontwoman Fabie, au Turbo Haüs. Dès le début de leur set, je me suis sentie projetée au Bronze, mythique salle de spectacle de la série télévisée Buffy the Vampire SlayerBuffy contre les vampires», au Québec). 


      crédit : @h.irsch

En arrivant chez moi ce soir-là, j’ai eu envie de me replonger dans cette série que j’avais tant aimée quand j’étais jeune! La série a été diffusée entre 1997 et 2003, autant dire que j’étais ben jeune la première fois que je l’ai regardée. Probablement comme vous, le souvenir que j’en gardais était celui d’une jeune femme qui avait été choisie pour combattre les vampires, les démons et toutes les affaires weird qui semblaient omniprésentes dans sa petite ville. Avec mon regard d’adulte, j’ai découvert une toute autre série, pleine de degrés et de nuances. Mais surtout, avec le féminisme comme toile de fond. 

Des personnages féminins complexes et complets 

Fût une époque (et c’est encore malheureusement parfois le cas) où les personnages féminins au cinéma et à la télévision étaient classés dans des catégories stéréotypées, telles que « la belle fille qui suit la mode et est un peu nounoune » (Jennifer Aniston dans Friends), « la sportive » (Mary-Kate Olsen dans pratiquement tous les films avec sa soeur jumelle), « l’intello » (Rachael Leigh Cook dans She’s All That), « la jeune fille sage et timide » (Reese Witherspoon dans Cruel Intentions) ou « la populaire et méchante » (Rose McGowan dans Jawbreaker). Les personnages féminins appartenaient bien souvent à une seule catégorie, les rendant unidimensionnels et peu nuancés. Buffy n’est pas réduite à incarner une catégorie: elle est belle, suit la mode, est sportive, forte, agile et rapide. Elle est populaire tout en étant timide. Elle a un sens de la répartie aiguisé et du leadership, elle est créative et loyale. Elle n’est pas une demoiselle en détresse qui attend de se faire sauver: c’est elle qui va secourir son « prince charmant ». Elle vit des émotions, prend des bonnes et des mauvaises décisions, aime de tout son cœur et gère les aléas de la vie autant que les nombreuses fins du monde. Elle est complexe. Elle est humaine (et 100% badass!). 


source : internet

Il en va de même pour les autres personnages féminins de la série. Que ce soit au cinéma, à la télévision ou en littérature, les personnages secondaires féminins servent bien souvent (lire: trop souvent) de faire-valoir aux protagonistes. Dans Buffy, elles servent à l’intrigue. De sorcières à ex-démon, en passant par une clé pour ouvrir les portes entre les dimensions, les personnages secondaires féminins sont aussi puissants que Buffy elle-même. 

Sans surprise, Buffy passe le test de Bechdel-Wallace haut la main! Ce test vise à démontrer la surreprésentation des personnages masculins dans les œuvres de fiction en se basant sur trois critères: qu’il y ait au moins 2 femmes présentes dans l'œuvre, que des femmes parlent ensemble et que leur sujet de conversation ne concerne pas les hommes. Ben de base, me direz-vous, mais seulement 56,7% des films passent ce test. En contrepartie, 93% des épisodes de Buffy (soit 133 épisodes sur 144) passent le test de Bechdel-Wallace. 

Plus qu’une série pour ados

 
source : internet 

Oui, il y a des vampires. Oui, il y a de la romance. Oui, les filles veulent un cavalier pour leur bal de finissants et rêvent de leur premier baiser. Mais c’est tellement plus que ça.

Dans les premières saisons, alors que les personnages sont au secondaire, plusieurs sujets sont abordés sous le couvert des créatures monstrueuses qui rôdent en ville. Par exemple, un étudiant concocte une potion qui le rend violent et brutal dès qu’il est en colère (S03 E04), et sa copine a soudainement plusieurs blessures apparentes. Lorsqu’on la questionne, elle répond que c’est de sa faute à elle si son amoureux a perdu patience, qu’il a changé et qu’il n’était pas comme ça avant. Vous voyez ce que je veux dire? Dans l’émission, il a littéralement changé à cause de la potion… mais combien de fois on a entendu cette phrase dans des cas de violences conjugales? Oui, les monstres servent à l’histoire, mais leur présence sert également à aborder certains enjeux. C’est de la même façon que sont amenés les thèmes du racisme, de la santé mentale et de la culture du viol, pour ne nommer que ceux-là.

À partir de la quatrième saison, alors que les personnages transitionnent doucement vers l’âge adulte, les enjeux cessent d’être métaphoriques et sont présentés sans détour, dans la vie de tous les jours. Parce qu’on le sait, les problématiques, les injustices et les enjeux, aussi monstrueux soient-ils, font partie de la vie. Mal de vivre, coming out, relations toxiques, deuil, agressions sexuelles… Tout y passe head-on.

 TW: agression 



Est-ce qu’on peut revenir sur le fait que la série date de 1997, s’il vous plaît? Au même moment où les Spice Girls nous servaient des clichés gros comme le bras dans leur film Spice World, Buffy the Vampire Slayer brisait des barrières, passait des messages et montrait à ses jeunes téléspectatrices qu’elles avaient le droit d’être autre chose qu’un cliché. Pas pire pour une fille qui tue des vampires avec un bout de bois. 

Divulgâcheur de la finale de la série, mais qui exemplifie à merveille le point de ma chronique. Buffy… mic drop. 



Pour aller plus loin ;

https://homes.cs.washington.edu/~msap/pdfs/sap2017connotation.pdf
https://bechdeltest.com/statistics/

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